Pour sa deuxième exposition à la Galerie RX, Pauline Guerrier délivre une série de tableaux en marqueterie de paille de seigle conjuguant un travail de recherche autour de la spiritualité, de la nature et du rapport inextricable qu'entretiennent ces sujets avec l'Homme.
Avec La Réconciliation, Pauline Guerrier dévoile son désir de voir réunis l’Homme et la Nature. Cette série de tableaux se dresse comme une liturgie panthéiste et propose une mythologie universelle. Un message planétaire, simple, lumineux et nécessaire dans un monde troublé. Les images de La Réconciliation jouent de l’iconographie des grandes religions et spiritualités mais aussi de différents symboles mythologiques ancrés dans la culture générale collective. De cette osmose se déploie une mythologie globale et intemporelle.
Chaque tableau projette un élément. L’air est symbolisé par l’envol des oiseaux, la terre par l’embrassade des arbres, et enfin la mer par le portage du poisson. Les êtres humains sont représentés ensembles, unis, dans un contact direct avec ces éléments. Leur corps, leurs peaux, leurs mains, leurs sens sont liés avec la nature qu’ils embrassent, supportent et magnifient. Dans cette série d’images, chaque personnage est émerveillé par la puissance et la beauté du monde.
La Réconciliation présente une communion éblouie où le fils perdu de la Nature, l’Homme, serait enfin retrouvé. L’envol fait écho directement à l’épisode biblique de l’annonce de la fin du déluge. Le temps des retrouvailles a donc sonné. Tous les personnages des tableaux remercient la nature pour ses dons vitaux, descendent de leur piédestal fantasmé, pour faire à nouveau corps avec son écosystème naturel.Ils chérissent la faune et la flore en s’y incorporant eux-mêmes. La Nature est déifiée mais elle n’est plus un objet de culte extérieur, l’être humain a repris sa place dans le Monde.
Les douze tableaux que constitueront La Réconciliation font écho aux douze mois de l’année, le tour des saisons qui régénèrent la Terre. Mais l’outil de la paille est certainement le symbole le plus éloquent du travail de Pauline. Ce choix de la paille de seigle montre à lui seul l’alliance de la culture et de la nature. La paille est ici le médium pour dévoiler la richesse et la splendeur de la nature : la technique rare de la marqueterie déroule des images profondes, à l’aspect noble et brillant, et dessine des champs de profondeurs lumineux et rayonnants qui semblent tout de suite nous rapprocher des icônes religieuses. Pourtant, la matière brute à la base de la magie de la réconciliation, le seigle, est aussi la base de la farine et donc de l’alimentation transformée. Elle fut une des premières à être cultivée par l’Homme et représente sa volonté de dompter le monde à son service. Pauline, elle, dompte ici la paille autrement, pour rendre hommage et sublimer sa nature nourricière.
Dans notre époque brusquement incertaine, où l’on tâtonne le moindre repère, le message de paix instinctif et si brutalement poétique de Pauline se pose à nous comme une respiration.
Eugénie Bey